====== Regards disciplinaires croisés ====== === L’interdisciplinarité au cœur de la démarche du projet === Le projet ALARIC met au cœur de son fonctionnement la transdisciplinarité, expérimentée au sein du laboratoire d’excellence IMU – Intelligence des Mondes Urbains fondé sur la pluralité scientifique. Elle se déploie dans ses différents degrés afin de pouvoir tester la possibilité d’en tirer des résultats concrets pour la recherche. Des ateliers expérimentaux proposent le croisement de différents regards disciplinaires en sciences humaines autour d’une thématique donnée. Les discussions témoignent de l’existence de regards parfois conflictuels, de langages divergents, qui viennent interroger sur le degré de compréhension atteignable entre les disciplines. Cette multidisciplinarité en acte doit favoriser la confrontation d’approches de recherche hétérogènes, à même de s’inspirer mutuellement. L’interdisciplinarité se déploie également par la mise en œuvre d’une plateforme de visualisation des sources mobilisées et de reconstitution de l’urbanité de deux espaces d’ancienne industrialisation qui s’effectue en étroite collaboration avec les chercheurs en informatique du LIRIS et des géographes et historiens. Cette plateforme doit constituer le matériau premier d’analyse du changement urbain, dans le cadre de la thèse de doctorat de Clémentine Périnaud, géographe-urbaniste. C’est là une rencontre disciplinaire qui dépasse le clivage sciences humaines/sciences « dures ». Dans la simple désignation de ce matériau de recherche viennent se lire les divergences disciplinaires, différences d’approches épistémologiques et dans la façon de faire la recherche qu’il s’agit de faire cohabiter : les données des informaticiens, les sources des historiens, le dispositif des géographes. La rigueur vient se nourrir des impératifs des différents chercheurs porteurs de cultures scientifiques différentes. === Interdisciplarity, a central aspect of ALARIC project === Transdiciplinarity is central to the ALARIC project, such as in the high quality laboratory IMU – that finances the project – Intelligence des Mondes Urbains, Intelligence of Urban Societies - which is based on scientific plurality. It is explored in its various degrees to test its concret outcome for research. Different experimental workshops throughout the project will tempt to confront diverse disciplinary perspectives in human science on a selected theme. Discussions mark the existence of sometimes highly diverse views and languages, that interrogate the degree of understanding between scientific disciplines. Interdisciplinarity is also tested by implementing the digital plateform reconstructing the evolution of ancient industrial urban sites in 3D, thanks to the close cooperation between computers scientists (LIRIS) and geographers and historians. This plateform is meant to be the first material of analysis of urban change, in the course of a doctoral thesis in geography and spatial planning carried by C. Périnaud. This disciplinary encounter over crosses the gap between human sciences and “hard” sciences. ====== Comptes-rendus des rencontres interdisciplinaires ====== === Atelier expérimental 1 : saisir le quotidien terranéen - 18 juin 2014 === ===== Atelier expérimental 1 du projet ALARIC ===== === "Regards disciplinaires croisés: saisir le quotidien terranéen/à Terrenoire", 18 juin 2014 === == Propos général == ALARIC a pour projet initial de saisir et comprendre le changement urbain, et plus précisément le changement urbain sur d’anciens territoires industriels à l’urbanité spécifique. Terrenoire offre une lecture de deux séries de changements : le premier a consisté dans la mise en place d’un espace industriel qui, d’un point de vue qualitatif, ne subit pas de réelles transformations jusqu’aux années 1980, jusqu’au surgissement d’une nouvelle orientation urbaine pour Terrenoire. Que devient cette ville que l’on peut dès lors qualifier de post-industrielle ? Comment se saisir de sa matérialité urbaine ? Car ces reconfigurations spatiales, ces transformations structurelles s’expriment, bien évidemment de façon imperceptible, dans le quotidien des contemporains. Pratiques et formes urbaines se lisent ainsi comme banales, jusque dans leurs mutations. En proposant une lecture croisée de ce type de territoires et de la façon de saisir le quotidien urbain, l’enjeu est de pouvoir montrer comment plasticiens ou géographes ont pu ou ambitionnent de se saisir de cette matérialité, avec pour visée peut-être d’y dévoiler la structure évolutive du quotidien urbain. == Matin – visite de terrain == **« Lecture diachronique de Terrenoire —Urbanisation industrielle et post-industrielle » – C. Périnaud, doctorante EVS/IMU** Une lecture initiale de l’urbanité térranéenne proposée sur le terrain par Clémentine Périnaud, doctorante sur le projet ALARIC, a eu pour objectif de remettre en perspective la construction du paysage terranéen dont la stratification a progressivement été mise en évidence dans le parcours. Elle a été discutée par Cendrine Sanquer, animatrice de l’architecture et du patrimoine à la ville de Saint-Etienne, service Ville d’Art et d’Histoire. Celle-ci a pu éclairer les démarches récentes de patrimonialisation de ce quartier fortement marqué par des implantations industrielles symboles de la première industrialisation en France. A lire le document d’accompagnement de la visite de terrain XX lien XX == Après-midi – différentes démarches plastiques de saisine du quotidien urbain == Comment, en vis-à-vis de cette expérience, les chercheurs-plasticiens donnent à lire ce quotidien urbain ? Quelles sources et quels angles de vue peuvent en rendre compte pour une recherche en géographie-aménagement ? **Le tropisme géographique de la photographie contemporaine – D. Méaux (CIEREC)** Danièle Méaux, maitre de conférence en art plastique et en histoire de la photographie (CIEREC – EA 3068), s’est interrogé sur la façon dont certains photographes peuvent explorer aujourd’hui les espaces du quotidien urbain selon une démarche questionnante. Différents ouvrages critiques reviennent sur l’expansion de la photographie paysagère comme genre à part entière, depuis les années 1980. Cette tendance est à mettre en relation avec d’autres traits de la photographie tel que l’usage du grand format et le passage à la couleur. Elle s’associe à une tendance des photographes contemporains à mettre en place des questionnements de type géographique au travers de leur production, façon propre de réinterroger les territoires du quotidien. Les photographes ont nourri un très fort intérêt pour les paysages développés après guerre, notamment pour les zones périurbaines et commerciales à la frange des villes, pour des sites ordinaires re-considérés. Jürgen Nefzger a ainsi pu mettre en valeur leur caractère impersonnel de ces espaces, contradictoire avec l’idée de l’habiter. Dominique Auerbacher a pu souligner dans son travail l’uniformisation du mobilier urbain, la surabondance des enseignes. Nombre de photographes ont ainsi développé un intérêt sans jugement pour l’accélération de ces changements. Une autre tendance est ainsi celle de vouloir capturer la diachronie d’un espace (Beatrix Von Conta), sa polyrythmie, les traces d’un vieillissement qui s’effectue selon différents rythmes : les temporalités, usure de la pierre, rythme des floraisons, écaillement de la peinture, sont toutes appelées dans un même cadre. La photographie amène à prêter attention à la coexistence de ces rythmes différents. Les espaces révèlent également les rapports de pouvoir à l’œuvre (Thierry Girard). La photographie souhaite alors déceler les conflits existants au sein de la société, notamment sur l’occupation des sols. Les critiques ont ainsi pu évoqué un tournant spatial de la photographie, qui apparait comme un laboratoire de réflexions, mouvement qui s’est traduit par une démarche active de collaboration avec des praticiens de l’urbanisme, à l’exemple du travail de Gabriele Basilico commandé par la Datar. L’intervention de Danièle Méaux est revenue sur les raisons propres à l’histoire de la photographie dans ce tournant photographique, comme sur les déterminants extérieurs au champ de la photographie : ces travaux se font en effet le miroir de questions émergentes (développement, aménagement, cadre de vie, environnement). Un second temps de cette intervention a permis de qualifier cette façon propre à l’art photographique d’interroger les paysages. **Une démarche plastique d’appréhension des espaces urbains développée au sein de l’ESAD - K. Mokkadem (ESAD, Saint-Etienne)** Kader Mokkadem, enseignant-chercheur de philosophie et d’esthétique au sein de l’Ecole Supérieure d’Art et de Design de Saint-Etienne, a pu présenter le travail réalisé avec ces étudiants en esthétique, expérimentation des différentes manières de parcourir le territoire et produire des images, autant de façon différentes de voir ces espaces urbains. Un travail est ainsi mené sur la manufacture Plaine-Achille depuis plusieurs années, espace fortement industrialisé pour être reconverti depuis les années 2000 en quartier créatif, avec l’implantation de la Cité du Design dans l’ancienne manufacture d’armes. Une première stratégie est de chercher à changer l’image du territoire, non pas pour en proposer une autre, mais plusieurs autres, avec cette volonté de retravailler l’imaginaire du territoire, créer du désir, de la narration, et pas seulement dans une perspective documentaire. Vers quelle imaginaire peut-on tendre ? Il fallait en préalable aller sur ce territoire pour rendre compte des mutations en cours, après une consultation sommaire de la documentation. Chaque individu, une fois sur le terrain, est porteur de sa propre idée plastique et d’une forme de restitution particulière de cette expérience physique. Marcher, courir, naviguer sur Google map, photographier, dessiner, produire des cartes interactives de parcours sonores, restitution immédiate dans des « mini brut » ou un format plus imposant, la production a témoigné de la cohabitation de plusieurs manières de parcourir le territoire.